Les efforts du jeune homme pour la faire rester auraient pu rester vains, Aelys étant du genre imprévisible elle aurait pu soudainement retourner sa veste et disparaître dans la forêt pour que jamais plus il ne la revoit. D'autant plus que ses connaissances sur les chasseurs la déroutaient. Elle avait la vague impression qu'il n'était pas si innocent qu'il y paraissait. Mais elle voulait y croire, elle voulait sincèrement pouvoir s'entendre avec quelqu'un pas seulement parce qu'il le fallait, mais parce qu'ils en auraient envie tout les deux. « J'appelle ça des supplications, pas une obligation... Mais c'est d'accord. » sourit-elle, lui adressant un clin d'oeil, elle-même surprise de s'entendre répondre positivement à son invitation. Pour ce qui était de qui prendrait le sofa et qui prendrait le lit, elle demeurait et demeurerait intraitable. C'était sa maison, sa chambre, son lit. Et il avait bien plus besoin de repos qu'elle. Sa remarque lui tira pourtant un sourire, alors qu’elle s'obstinait à secouer doucement la tête. « Dors dans ton lit, fais comme si j'étais pas là, je pourrai vraiment pas fermer l’œil. La raison est plutôt stupide et tu vas rire, mais sans le Teddy de mon frère je ne peux pas dormir. Et je te rassure tout de suite, non, je ne suis pas nymphomane. » Pour tout dire, elle était encore vierge, donc bien loin du compte... Et oui, ayant vécu deux ans dans la forêt, quand voulez-vous qu’elle ai trouvé le temps ? Depuis son retour à Shreveport, elle était plutôt du genre à éviter le contact humain (ou non-humain, peu importait l'espèce elle n'aimait personne). Le regardant disparaître dans les escaliers en chancelant, Kanel ne résista pas à l'envie de l'aider et se leva sans tarder pour le rejoindre. Le fait est que, tout comme la première fois qu’elle avait tenté de l'aider, elle manqua de le tuer. A un moment, il ne voudrait définitivement plus de son aide ! « Désolée, promis j'essayai pas de te tuer. » Elle lui décocha un vague sourire avant de le pousser vers la porte de la cuisine, s'attelant ensuite à nettoyer le sol qu'elle lui avait malencontreusement fait salir en le faisant sursauter. Peu après, elle ré-apparaissait dans le salon et déposait une assiette de pain perdu devant Izaiah. En y regardant bien, elle n'avait toujours pas faim. Elle n'aimait pas le pain perdu, trop... trop. S'asseyant à côté de lui, elle se perdit dans ses pensées, son regard clair fixé sur le mur face à elle sans vraiment le voir. Jusqu'à ce que le crissement des pieds de la chaise du jeune homme sur le sol ne l'arrache à ses songes. Elle le regarda se lever et suivit son déplacement du regard jusqu'à ce qu'il ne disparaisse dans la cuisine, pour revenir quelques secondes plus tard. « Tu devrais dormir, maintenant. Il se fait tard et il vaut mieux que tu t'allonges étant donné que tu risque un nouvel évanouissement ou une chute à chaque pas... » La faute à qui ? Félicitations Aelys ! Elle avait des airs de maman inquiète lorsqu'elle s'y mettait, c'en était presque hilarant. Comme tout le monde obéit à sa maman, il s'exécuta, et elle lui adressa un sourire, ravi qu'il suive son conseil, avant de laisser retomber son visage entre ses bras posés sur la table lorsqu’elle fut sure qu'il avait disparut dans les escaliers. Paupières closes, elle prit une profonde inspiration pour faire retomber toute la pression du jour. Dormir ? Comment pouvait-elle dormir alors qu'elle était passée par la peur et le traumatisme ? Comment fermer l’œil dans un lieu inconnu ? Et surtout, comment faire sans l'ours de son frère, son seul et unique souvenir de lui, son doudou bien qu'elle approche les vingt et un ans. C'est là qu’elle remarqua -enfin- l'odeur des vêtements qu’elle portait. Identique à celle de l'ours. Evidemment ! avant de le lui rendre, Izaiah avait lavé la peluche, elle s'en était instantanément rendu compte, aussi bien sous forme humaine qu'en tant que coyote. Etant sur son ours, l'odeur ne l'avait pas dérangée, elle avait continué à dormir avec nuit après nuit... Cette odeur, celle du jeune homme, lui était familière. Une heure après qu’elle l'ait convaincu d'aller se coucher, elle monta à son tour, en se persuadant elle-même que ce n'était que pour vérifier qu'il dormait et allait bien. La vérité était qu'elle commençait sérieusement à s'attacher à lui. S'asseyant à côté de lui alors qu'il avait les yeux clos mais ne semblait pas encore avoir trouvé le sommeil, elle se prit à sourire dans la pénombre et se glissa à ses côtés. Sans lui demander son avis, elle enfouit son visage dans son cou et ferma les yeux, posant un doigt sur la bouche d'Izaiah pour s'assurer qu'il ne dirait rien qui puisse briser son envie soudaine de se rapprocher de lui. Et de dormir. « Chuuut... » Laissant retomber sa main le long se son corps, elle prit conscience que, désormais, elle pourrait sans problème trouver le sommeil.