« Je rêve d'une terre sereine, là où les gens balancent leurs peines... »
Grégory Lemarchal.

Cette chanson est magnifique et reflète parfaitement bien la réalité. Je suis comme Grégory, une rêveuse dans l'âme, même si je ne le montrerai jamais. Ma vie est bien trop compliquée pour que je me laisse aller à rêver tout haut. Vous allez très vite comprendre pourquoi je dis cela...

Tout d'abord, il faut savoir que je suis la petite dernière d'une famille de trois enfants. Il y a eu Logan, Wendy, puis Liah, donc moi. Mes parents ont décidé d'arrêter les frais après ma naissance. Ils ont eu raison... Parce que j'ai déjà quatre ans d'écart avec mon grand frère, mais s'il n'y avait que cela, tout serait plus simple...

Je ne peux pas dire que j'ai eu une enfance triste. Bien au contraire. Mes aînés ont toujours été là pour moi. Quand Logan n'était pas là, Wendy prenait le relais. J'ai toujours été très bien entourée. C'est à l'adolescence que ça s'est gâté. Mais chaque chose vient à bout à qui sait attendre n'est-ce pas ? Vous allez donc devoir attendre !

Alors que ma sœur, Wendy, s'amusait avec les garçons, je m'appliquais à ne pas l'imiter. A treize ans, j'ai compris que sa façon d'agir était méchante et vile. Je me rappelle d'une dispute qu'on a eu à ce sujet. Aujourd'hui, elle sait que j'avais raison de la mettre en garde, mais à l'époque, ce fut très violent...

WENDY : « Tu ne peux pas dire une chose pareille en me regardant dans les yeux ! Tu ne sais pas ce que j'ai vécu alors tais-toi ! »
LIAH : « Je dis ce que je pense et je pense que tu devrais arrêter tes conneries de passer de mec en mec ! C'est malsain et dégoûtant ! »
WENDY : « Cause toujours petite sœur, je fais ce que je veux. Personne ne me dicte ma conduite et sûrement pas toi. »
LIAH : « Mais enfin merde Wendy ! Tu as quinze ans, je suis censée être la plus naïve dans l'histoire, c'est toi qui est sensée veiller sur moi pas le contraire ! »
WENDY : « Oh on Dieu, la jolie et irréprochable Liah a dit un gros mot, le monde va s'écrouler ! Et encore une fois, mêle-toi de tes affaires petite sœur. »
LIAH : « Ce sont mes affaires puisque ton comportement discrédite toute la famille.  »
WENDY : « C'est n'importe quoi. Logan court après n'importe quelle fille et tu ne lui dis rien à lui. »
LIAH : « On parle de toi là, pas de Logan. Un de ces jours, tu vas te retrouver enceinte et tu ne sauras pas quoi faire. Tu n'as que quinze ans Wendy ! »
WENDY : « Va te faire voir Liah ! Occupe-toi de tes affaires ! Si jamais je tombe enceinte, comme tu le dis si bien, je ne viendrai pas t'en parler, je saurai prendre mes responsabilités, t'en fais pas pour moi. Maintenant casse-toi et fous-moi la paix ! »

Le souvenir de cette dispute me retourne encore l'estomac. Car je n'aurais jamais pensé avoir raison, je ne voulais pas avoir raison... Quatre ans plus tard, Wendy se retrouvait enceinte et nous demandait à tous de garder le secret en faisant passer son fils pour notre frère...
Mais avant cela, un autre fait important doit être cité : Logan est devenu papa. Il avait dix-neuf ans et sa copine de l'époque n'était pas responsable. Elle l'a abandonné lui et le bébé. Entre temps, il s'était trouvé un petit appartement pour Gabrielle, sa fille, et lui. Ma mère a été dévastée. Il était jeune et elle n'a pas supporté le fait de voir son fils partir. Papa s'en fichait. Son travail à l'armée lui prenait tout son temps. Wendy a continué de coucher à droite à gauche et je me suis retrouvée au milieu. J'avais quinze ans quand tout a dérapé...

LIAH : « Maman ? Tout va bien ? »
JULIA : « Oui, ça va... »
LIAH : « Tu en es sure ? Parce que ça n'a pas l'air d'aller fort. »
JULIA : « Je te dis que ça va. »
LIAH : « C'est à cause de Logan ou de Wendy ? Je suis sure que c'est le départ de Logan qui te rend malade. »
JULIA : « Je ne suis pas malade ! »
LIAH : « Ça fait deux jours que tu ne manges rien, essaies au moins d'avaler quelque chose. »
JULIA : « Je n'ai pas faim. »
LIAH : « Ton contrat pour Milan est terminé ? »
JULIA : « Liah, s'il te plaît, laisse-moi dormir. Je te promets que demain ça ira mieux. »

Ce fut la première de nos nombreuses conversations qui n'ont aucun sens. Maman a commencé à péter les plombs au moment où Logan a quitté la maison. Mais il n'y avait pas que ça. Papa ne rentrait pas et ça la rendait malade. Sans oublier que le mannequinat était une profession pour les jeunes femmes et que maman n'allait pas en rajeunissant. Tout s'écroula d'un coup et j'étais seule au milieu de tout cela. Je faisais de mon mieux pour palier à l'absence de mon père, alors que ma grande sœur gérait la crise à sa manière. En déduire coucher avec tous les mecs qu'elle croisait. Je faisais tout ce que je pouvais pour soutenir maman, je la nourrissais presque de force. La nourriture n'était pas ce qui rentrait le plus facilement...

Puis à seize ans, j'ai moi aussi changé du tout au tout. J'ai commencé à ne porter que du noir et des vêtements très provocants. Je voulais que ma mère se réveille, lui faire avoir un électrochoc mais rien n'y fit. Papa a bien essayé, lors d'une de ses permissions, de me remettre dans le droit chemin comme il se plaît toujours à le dire, mais je ne voulais pas changer. Je ne veux toujours pas. Il n'a pas eu beaucoup temps pour tenter de me faire changer, mais quoi qu'il ait pu faire, ça n'a pas fonctionné. J'ai continué à provoquer, une nouvelle Wendy était née. Bien que je ne voulais en rien ressembler à ma sœur, j'agissais comme elle. A une différence près : je ne m'amusais pas avec les garçons. J'ai deux règles dans la vie : ne jamais m'amuser avec les hommes et ne jamais sortir avec un militaire. J'ai dépassé ces deux règles au moins une centaine de fois.

Puis vint l'année de mes dix-sept ans. Wendy a mis Joshua au monde et ce petit bonhomme a transpercé mon cœur. Il était si mignon, si attachant. Wendy nous a fait promettre à tous de garder le secret en le faisant passer pour mon petit frère. Dire que j'approuvais cette décision serait mentir. Je n'ai jamais aimé le mensonge. Mais Michael était si mignon que je ne voulais pas qu'il souffre en sachant que sa seule tatie ne l'acceptait pas. Je ne voulais pas qu'il vive ce que j'ai vécu, même si ça allait tout de même être le cas.
La naissance de Michael n'a rien changé au comportement de ma sœur. Elle a continué à draguer tous les mecs de la ville. Quant à moi, je continuais mon petit bout de chemin. Je m'habillais toujours en noir et me maquillais outrageusement. Contrairement à ma sœur, je ne couchais pas avec les garçons que je rencontrais. Je n'ai pas sauté le pas avant mes dix-huit ans. Mais c'est une autre histoire... Avant cela, je n'avais jamais connu l'amour. J'errais ici et là, tentant de faire comprendre à ma mère que la vie valait la peine d'être vécue, mais elle ne voulait rien savoir. Puis un jour, nous n'avons plus eu de nouvelles de papa. Ce fut l'horreur. On a tous cru qu'il était mort. La vérité était toute autre... Monsieur Dawson ne pouvait communiquer sa position car n'avait pas de moyen de communication. J'ai cru faire une crise cardiaque en ne le voyant pas revenir. Mais le jour J arriva, enfin. Tout le monde fut soulagée. J'ai même cru que cela résoudrait tous nos problèmes de famille, mais je me trompais lourdement... Maman a repris du poil de la bête mais ça n'a pas duré... Elle est vite retombée dans sa catatonie quotidienne. Papa n'a même pas essayé de l'en sortir. Leur couple battait de l'aile depuis un petit moment mais j'aurais cru que ça changerait... Là encore, je me trompais...

Mes dix-huit ans  ne furent pas accueillis dignement. Pour faire simple, je n'ai pas eu de fête d'anniversaire, personne ne me l'a vraiment souhaité. Tout le monde avait ses propres problèmes à gérer, et moi, je me fichais qu'on me le souhaite ou non. J'ai trouvé un petit boulot de serveuse dans un pub non loin de chez moi. A croire que j'étais vouée à marcher sur les traces de ma grande sœur alors que c'était précisément ce que je ne voulais pas faire. Mais quand on n'a pas le choix... J'ai arrêté mes études contre l'avis général, mais que pouvaient-ils y faire ? J'ai pris ma décision et il était hors de question que je remette les pieds à l'école. Mes notes ont commencé à dégringoler quand j'étais en troisième, pas besoin d'être un génie pour comprendre que je n'irai pas loin. Tout le monde me répétait que si je m'en donnais la peine, je réussirais. Mais là était le problème, je ne voulais pas m'en donner la peine. Je me murais dans un monde qui n'était pas tout à fait le mien.
Puis j'ai rencontrer Samuel. Il était beau, charmant et beaucoup plus âgé que moi. Il faisait aussi partie de l'armée. C'était le collègue de mon père. Ce fut comme un coup de foudre. Alors que je ne croyais pas vraiment à l'amour, Samuel est arrivé et m'a fait comprendre que je devais y croire. Pour tout vous dire, ma sœur Wendy a d'abord essayé de lui mettre le grappin dessus. Il n'a pas cédé, elle ne l'intéressait pas. Il n'avait d'yeux que pour moi alors que je m'appliquais sans arrêt à le rejeter. Il n'a pas laissé tomber. Et ça a payé. On a commencé à sortir ensemble deux mois après mon anniversaire. Comme je ne voulais pas que tout le monde soit au courant, on se voyait en cachette. Il faut dire que sortir avec un homme âgé de dix ans de plus que vous n'est pas une chose très bien vue. Bien que je me fiche éperdument de ce que pensent les gens. Mais je ne voulais pas que mon père soit au courant. Bien qu'à mes yeux, il s'apparente à un déserteur, je ne voulais surtout pas qu'il chercher à m'enlever Samuel. Il ne l'a pas fait. La vie l'a fait à sa place...

Quand j'ai eu vingt ans, Samuel a été envoyé loin de Los Angeles. Le jour où il de son départ, il était prévu que l'on se retrouve à son campement. Mais tout ne s'est pas déroulé comme prévu... Alors que nous devions nous dire au revoir, comme avant chacune de ses missions, je n'ai pas pu lui dire autre chose que « Va te faire foutre ! » en guise d'adieu. Comment auriez-vous réagi si vous aviez été à ma place et que vous aviez trouvé des sous-vêtements féminins dans son lit ? Sous-vêtements qui n'étaient pas les miens, évidemment. Samuel n'a pas su m'expliquer. La honte se lisait sur son visage. Il m'a laissée partir, j'étais dévastée. Je le suis toujours...

Aujourd'hui, j'ai vingt et un ans. Ma vie n'est pas toute rose mais je fais avec. Je ne travaille plus dans le pub en bas de chez moi. J'ai quitté le domicile familial après le départ de Samuel. Ma mère ne va toujours pas mieux et je lui envoie une partie de ce que je gagne au Starbucks chaque mois. J'ai repris les études, je veux devenir photographe. Je sais, comme ma sœur. Mais ça n'a rien à voir avec elle. J'ai beau suivre ses traces, je ne suis en rien comme elle. Je veux vivre ma vie, tracer moi-même mon chemin. Je ne m'habille plus tout de noir mais je n'ai tout de même pas adopté le look bonne sœur. Je ne crois plus en l'amour. Samuel a pris ce que j'avais de plus cher et l'a détruit. Je fais avec. C'est la vie.