Le temps des explications avait sonné. Je n'avais pas envie d'y passer mais il le fallait. La situation ne pouvait pas rester telle quelle. Je n'aurais pas pu supporté de rencontrer Mike un de ces jours avec tous ces non dits, et on aurait probablement essayé de ne rien dire de ce qui s'est dit sur Facebook, mais ça m'était impossible... Je ne comprenais pas comment nous en étions arrivés là. Moi-même j'étais surprise qu'on en arrive là. Et j'avais envie de crier. Il se passait tant de choses dans ma vie en ce moment, je n'avais pas besoin de ça en plus du reste. Peut-être était-ce parce que moi aussi je ne savais pas quoi ressentir vis-à-vis de Mike ? Il a toujours été comme mon grand frère, il est celui qui a sauvé mon père et aujourd'hui, je suis perdue... Je n'ai jamais voulu réfléchir à ce que Mike représentait à mes yeux. Je me suis souvent posé la question, mais j'ai toujours fait tout mon possible pour chasser cette pensée car ça m'était impossible d'imaginer qu'il soit plus que « mon grand frère ». Il l'a dit lui-même, nous sommes presque de la même famille... Enfin bon, l'heure des explications a sonné et ça n'aurait servi à rien de retarder l'inévitable.

21h, la plage. J'attendais que Mike arrive. J'étais stressée et je ne savais pas vraiment comment allait se passer cette rencontre. J'avais peur pour la suite. J'étais complètement perdue... Je ne cessais de jeter des coups d’œil rapides à mon portable pour vérifier que c'était bien l'heure. Et au moment où je regardais une énième fois le petit écran de mon nokia, je me suis aperçue que j'avais un message. C'était Samuel, il me demandait si je pouvais lui ramener des chocolats demain. J'ai souri en lisant son message et en entendant quelqu'un approcher, j'ai vite ranger mon portable dans poche de jean, tant pis, je répondrai à mon frère plus tard. J'essayais de garder constance mais en voyant Mike, ce fut difficile. J'ai cependant réussi à dire : « Salut... » Rien de plus, rien de moins. J'étais tendue. Mais ne voulant pas y aller par quatre chemins, j'ai alors repris : « On doit vraiment en parler... » Bon d'accord, il y avait mieux comme entrée en matière mais c'était sorti tout seul. Moi qui pensait il y a quelques jours qu'il m'en voulait pour je ne sais quelle raison, nous voilà en train de parler d'amour, ou à quelque chose qui s'y apparente. J'ai cependant attendu qu'il me réponde. Je n'osais pas trop m'approcher de lui...

Tout était allé très vite. En quelques jours, j'ai appris que Mike en pinçait pour moi, chose que j'avais du mal à gérer. Et contrairement à moi, il ne voulait pas en parler. Il me l'avait dit et ce n'était pas non plus difficile de le deviner. Alors en le voyant là devant moi, mon coeur se mit à battre la chamade mais pas comme je l'aurais espéré. J'avais peur... Peur de le perdre si les choses ce soir se passaient mal, peur qu'il m'en veuille d'insister de la sorte, peur de tant de choses qu'il serait trop difficile de toutes les analyser.

Mike manifesta une fois de plus son mécontentement face à mon besoin de parler de tout cela. Je voulais lui répondre que jamais je ne lui ferais du mal, pas intentionnellement en tout cas. J'aurais tant aimé qu'il comprenne qu'il était beaucoup pour moi. Que sans lui, je ne serais pas la fille que je suis devenue. Que sans son aide, ma vie serait bien triste et pauvre. Mais à ce moment là, ça n'aurait pas servi à grand chose. Il avait mal et je le voyais et je me détestais pour lui infliger ça. Mais nous ne pouvions pas rester dans ce genre d'impasse. Car la prochaine que je le croiserais, comment est-ce que je réagirais ? Je ne veux pas avoir à l'éviter toute ma vie, hors de question ! Il faut qu'on arrive à passer par dessus tout ça et le plus tôt sera le mieux. Je ne dis pas que ce sera facile, loin de là... Et si mon coeur ne s'arrêtait pas de battre comme il le faisait, ça rendrait les choses encore plus difficiles qu'elles ne le sont déjà. Mais il fallait avancer et pour ce faire, je me suis lentement avancée près de lui tout en lui répondant : « Mike, je... Je suis désolée. Mais je n'aurais jamais pensé que tu puisses ressentir ça, enfin pas pour moi... Tu as toujours été comme mon frère et c'est difficile pour moi d'imaginer qu'il puisse en être autrement... » Je me rendais compte au fur et à mesure de mon énoncé, que mes mots pouvaient blesser. J'ai fait de mon mieux pour continuer : « Et parler n'est pas inutile... Je t'aime Mike, enfin je t'aime bien, tu représentes tellement pour moi... » Je voulais tellement lui dire à quel point je me sentais désemparée face à cela que les mots ne vinrent pas. Malgré tout, j'ai tout de même réussi à dire : « Je ne veux pas te perdre à cause de... » Il fallait appeler un chat un chat mais je n'y arrivais pas... « A cause de ça... » Finalement, parler n'était pas vraiment une si bonne idée...

Autant dire que la situation n'était pas pour me plaire. J'étais gênée. Tellement gênée que je ne savais plus quoi dire. Je n'ai jamais été de ces personnes qui savent garder une présence sans reproches lors de situation similaire à celle que Mike et moi étions en train de vivre. En même temps, je l'avais choisi. C'est moi qui ai voulu en parler, lui n'a jamais été pour. Mais ni l'un ni l'autre n'étions à l'aise avec ce qui était en train de se passer. Il fallait que je trouve un moyen de le rassurer quant à nos avenir ensemble mais comment faire en sachant que moi-même je n'étais pas certaine de ce qui allait se passer ? Il est vrai que j'ai toujours énormément apprécié Mike, mais en tant qu'un grand frère. Je ne l'ai jamais imaginé autrement que dans ce rôle. Il a été un frère, un sauveur et un grand ami pour moi. Il l'est toujours mais de son côté, j'étais bien plus que sa petite soeur ou son amie. Et la différence d'âge n'aidait pas à ce que l'on soit autre chose que des amis. Mais le plus surprenant, c'est que je n'arrivais pas à comprendre comment on en était arrivés là. Comment une telle chose était-elle possible ? Je ne me souvenais pas un instant avoir eu une attitude qui aurait pu lui faire croire qu'on pourrait devenir autre chose que de grands amis. Mais l'amour ne se contrôle pas, je ne le blâmais pas pour ressentir tout cela. Je ne savais simplement pas comment réagir. J'avais mal pour lui, très mal. Mon coeur faisait des bonds à travers ma poitrine et à l'entendre me répondre qu'il ne supporterait pas de me voir avec un autre que lui m'arracha un léger sourire. Pourquoi ? Tout simplement parce que j'étais loin d'être prête de m'engager dans une relation amoureuse après celle que je vais de quitter. Il était absolument exclu que je m'engage sur ce terrain là avec quelques années. Je ne pouvais pas. De ce côté là, je pouvais tout à fait rassurer mon ami, ce que je me suis empressée de faire en répliquant gentiment : « Tu ne me perdras pas Mike, je te le promets. Et tu sais que je tiens toujours mes promesses. Et tu peux être tranquille, il n'y aura pas d'homme à aimer de si tôt. » J'étais sincère, je ne lui mentirais pas sur un sujet pareil. Je pouvais lire sa tristesse sur son visage et j'avais très mal pour lui. Dans une ultime tentative pour le rassurer, j'ai ajouté : « J'aurais tant aimé partager tes sentiments... » Mais ça n'aidait pas, bien au contraire. Enfin, je ne savais pas quoi dire d'autre. Tout ce que je voulais c'était le voir sourire. Mais ça n'était pas prêt d'arriver malheureusement... « Tu trouveras très vite l'amour de ta vie, c'est certain. » Je voulais y croire car c'était impossible à mes yeux qu'il continue de m'aimer alors que je le faisais souffrir en ne partageant pas ses sentiments. Même si je devais bien avouer que durant mon adolescence, j'ai ressenti autre chose à son égard que de l'amitié. Mais c'était du passé et je ne voulais pas déterrer tout cela. Je voulais qu'il soit heureux et très vite...

La situation n'en devenait que plus gênante. Mike pensait que je le prenais en pitié, ce qui n'était pas du tout le cas. J'étais juste gênée et triste qu'il ne croit pas en l'amour mais après qu'il pense une telle chose était totalement injustifiée, surtout me connaissant. Je sais ce que la pitié peut faire. Et jamais je n'en prendrai quelqu'un en pitié, oh ça non ! Alors pour lui répondre j'ai à mon tour monté le ton bien que ce ne soit pas dans mon tempérament. Je suis plutôt du genre posé et pas impulsif. Mais parler de tout cela avec Mike me gênait, il était comme mon grand frère et l'entendre me dire qu'il ressentait ce genre de choses pour moi me gênait et me mettait mal à l'aise. Donc pour lui répondre, le ton est monté... « Je n'ai pas pitié de toi ! Et je ne te mens pas ! Tu sais très bien comme je déteste ces deux choses là alors ne dis pas des choses pareilles ! » Ça n'était pas bon, pourquoi est-ce que j'en arrivais à m'énerver comme ça ? « Pourquoi veux-tu absolument qu'il se passe quelque chose avec Nick ? Je te le dis et je te le répéterai sans arrêt s'il le faut, il ne se passe rien entre lui et moi. » C'était vrai. En tout cas de mon côté, c'était le cas. [HJ : à ce moment-là c'était le cas;)] « Tu crois vraiment que je peux ressentir ce genre de choses pour toi ? » Une grimace vint ponctuer mon visage. « Tu le dis toi-même, tu es comme un frère pour moi, il n'y a rien de plus et il n'y aura jamais plus... » Pourquoi de le dire me faisait mal ? Toujours est-il que tout cela ne me plaisait pas. La discussion avait tous les risques de se transformer en dispute et je détestais ça.